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Eden Log

Affiche du film


Titre original

Eden Log

Synopsis

Un homme reprend conscience au fin fond d'une grotte. Tolbiac n'a pas la moindre idée des raisons qui l'ont amené jusque-là, pas plus qu'il ne sait ce qui est arrivé à l'homme dont il découvre le cadavre à côté de lui. Seule solution pour échapper à la créature qui le poursuit : remonter jusqu'à la surface à travers un réseau aux allures de cimetière et abandonné par une mystérieuse organisation, Eden Log.

Genre

Science-Fiction

Année de production

2007

France

Date de sortie en France

26 décembre 2007

Réalisateur

Franck Vestiel

Musique

Alex Cortés
Willie Cortés

Casting

Acteur
Photo
Rôle
Clovis Cornillac
Clovis Cornillac Tolbiac
Vimala Pons
Vimala Pons La technicienne
Alexandra Ansidei
Alexandra Ansidei  
Arben Bajraktaraj
Arben Bajraktaraj L'architecte
Zohar Wexler
Zohar Wexler  
Sifan Shao
Sifan Shao  
Tony Amoni
Tony Amoni  
Gabriella Wright
Gabriella Wright  
Asha Sumputh
Asha Sumputh  
Nadia-Layla Bettache
Nadia-Layla Bettache  
Mariella Tiemann
Mariella Tiemann  

 

 

Critique du Film

Note :

Eden Log de Franck Vestiel

La belle plante

Tourner un film de science-fiction en France est devenu pratiquement impossible. Alors lorsqu'il s'agit d'un premier film... Franck Viestel a donc mis la barre haut, là où la majorité des jeunes cinéastes dans l'Hexagone se tournent soit vers le drame intimiste, soit vers le polar, genre qui connait en France un regain d'intérêt depuis quelques années (et ce grâce entre autre à des personnes comme Olivier Marchal). Et sans l'aide de Jan Kounen et de Clovis Cornillac il y a fort à parier que le film n'aurait pas pu se faire, les noms des deux artistes étant un gage aux yeux des financiers, et ce même pour un film à petit budget comme Eden Log.
Le scénario, quand à lui, est signé Franck Viestel et Pierre Bordage. ce dernier est très connu des fans de littérature de science-fiction en France, puisqu'il en est en quelque sorte le leader de file, avec en particulier sa saga des guerriers du silence.
Mais comment Franck Viestel a-t-il réussi à attirer à lui ces trois noms prestigieux. Clovis Cornillac tout d'abord: leur rencontre s'est effectué sur le tournage de la série Central nuit, où Franck Viestel y était assistant. La rencontre avec Jan Kounen quand à elle s'est effectuée sur BlueberryFranck Viestel y était assistant réalisateur. Il a aussi tenu ce poste sur les Saint-Ange de Pascal Laugier et sur le Dante 01 de Marc Caro. C'est d'ailleurs sur le tournage de ce dernier que le jeune réalisateur fait la rencontre de Pierre Bordage, celui-ci étant à l'origine de l'histoire du film de Caro.
Tous sont fascinés par la culture de Viestel, ainsi que par la cohérence de l'histoire que l'homme a déjà en tête.

Eden Log de Franck Vestiel

Le film se monte donc, avec un budget pour le moins limité, surtout au vu des prétentions scénaristiques. Peu de moyens donc, mais aussi peu d'acteurs. Car mis à part Clovis Cornillac et dans une moindre mesure Vimala Pons tous les autres rôles tiennent plus de la figuration que d'autre chose. Mais loin d'être gênant (en tout cas pour tous ceux qui ne sont pas gênés par les films sans dialogue), ce minimalisme joue même en faveur du film, car il plonge le spectateur dans un état de claustrophobie (idéal vu le sujet du film) et de peur de l'inconnu (et donc de l'autre). Très vite dans le film se créera un effet étrange, où l'on désire en savoir plus, mais où dans chaque rencontre le danger semble présent, au point où le spectateur, tout comme le héros, semble ne désirer qu'une chose, c'est échapper à l'autre. Cela n'est pas sans rappeler la paranoïa d'un film comme The Thing (d'ailleurs, Viestel citera parmi ses sources d'inspiration John Carpenter, quoique plutôt pour son film New-York 1997). Par rapport au film de Carpenter Eden Log apparaît comme étant son inverse: omniprésence du noir contre le blanc dans The Thing, endroits clos chez le français contre espace infinis de l'Arctique pour l'américain.

Clovis Cornillac dans Eden Log de Franck Vestiel

Viestel se reconnait volontiers inspiré par nombre d'autres auteurs. On retrouve ainsi George Romero, et plus particulièrement son Zombi (même s'il est plus facile d'y voir du jour des morts-vivants, les deux films ayant en commun de se dérouler entièrement dans des grottes); Luc Besson, tout particulièrement dans ses premières oeuvres; Marc Caro et Jean-Pierre Jeunet, période la cité des enfants perdus; ainsi que Darren Aronofsky, et plus particulièrement Pi pour la gestion du noir et blanc et The Fountain pour son rapport à l'Arbre.
Côté bande dessinés, les inspirations de l'auteur sont à chercher avant tout dans Métal Hurlant, la référence absolue en termes de S-F adulte. Viestel de citer aussi Frank Miller et son Daredevil pour l'ambiance.
Mais Eden Log fourmille d'autres influences, toutes reconnues par l'auteur. Ainsi, impossible de ne pas penser au chef d'oeuvre de Ridley Scott, Blade Runner, en voyant Eden Log, ou plutôt en entendant Eden Log, car la gestion du son dans les deux films (due à Jérôme Wiciak dans le film de Viestel) est similaire, à savoir qu'elle ne cherche en aucun cas à faire futuriste, qu'elle est omniprésente, non directive et très imprégnative. Rares sont les films à arriver à un tel résultat.
De même il est pratiquement impossible de ne pas voir en quoi Alien, du même Ridley Scott, mais aussi (et surtout) sa suite, Aliens, de James Cameron, a influencé le premier film du français. Lorsque l'on découvre l'architecte, premier humain que rencontre le personnage joué par Clovis Cornillac, cloué au mur par une plante s'insinuant en lui, on se croit revenu à la découverte des colons parasité par les aliens dans le film de James Cameron.
Terry Gilliam aussi a visiblement eu son rôle dans le subconscient créatif de Viestel. La technologie (ou son absence) semble en effet tout droit sortie des films de l'ancien Monthy Python, que ce soit Brazil mais surtout l'armée des douze singes.
Enfin, que dire des mutants hantant les étages d'Eden Log, si ce n'est qu'ils semblent droits sortis du Silent Hill de Christophe Gans.

le secret d'Eden Log prêt à être révélé

D'ailleurs, l'une des influences majeures du cinéaste est le monde du jeu vidéo, dont Silent Hill n'est après tout qu'une adaptation plus ou moins fidèle. Le passage de salle en salle, puis d'étage en étage, avec à chaque fois ses rencontres, ses énigmes, puis ses objets à ramasser, n'est rien de plus qu'une transposition cinématographique du monde vidéo ludique, dont Viestel est un pur produit. Un produit de son époque en fait.
D'ailleurs, comme dans un jeu vidéo, le héros (Clovis Cornillac hyper impliqué dans son rôle, au point de tourner à la limite de la mise en danger physique, n'hésitant pas à plonger à moitié nu dans une eau très froide) évolue physiquement au fur et à mesure de son avancement dans les niveaux, devenant tout d'abord de plus en plus humain, puis surhumain. Aucune adaptation de jeu vidéo à ce jour ne peut se vanter d'avoir aussi bien réussi la translation d'un média à un autre.
Mais l'interprétation d'un point de vue jeu vidéo est loin d'être la seule d'Eden Log, le film étant très riche thématiquement parlant. Le sujet le plus évident est bien entendu l'écologie, tant la plante obsède, par son mystère et, tout simplement, par la place qu'elle prend à l'écran. Le danger d'un homme inconscient du mal qu'il fait à la nature est bien sur évident, mais l'inverse est aussi vrai, à savoir un homme qui ne sait lire le danger venant de la nature. Que ce soit dans un sens ou dans un autre (les deux faces de la pièce étant présentes dans Eden Log), l'homme semble incapable de voir quand il doit s'arrêter. Le danger de la non prise en compte de l'écologie par l'homme n'est bien sur pas nouveau, en particulier dans la science-fiction (voir par exemple Soleil Vert), mais Franck Viestel arrive à en dire beaucoup en peu de mots (et le moins que l'on puisse dire, c'est que le film n'est pas très bavard; heureusement d'ailleurs, car le gros point faible du réalisateur est bien sa maîtrise du jeu des acteurs, souvent très limites).
Autre sujet, sensible s'il en est, surtout dans un pays comme le notre: l'immigration. Le film en parle de façon très directe, et le parallèle avec notre monde est on ne peut plus clair. Les immigrés, à qui l'on promet monts et merveilles, se retrouvent à trimer dans les fins fonds de la société (ici au ses propre du terme), et ce au péril de leur vie. Ils servent alors corps et âme une société qui n'a véritablement que faire d'eux, aller jusqu'à les ignorer et même les cacher. L'hypocrisie va même jusqu'à faire de ces pauvres hères de véritables héros.

Vimala Pons dans Eden Log de Franck Vestiel

Bien évidemment, le film de Franck Viestel parle aussi de la religion, le titre même de son film y faisant clairement allusion. Là aussi le jeune auteur a des choses à dire, et comme bien souvent, une image (ou un film) vaut mieux qu'un long discours. Sans cite ouvertement l'une ou l'autre des grandes (ou petites) religions de notre société actuelle (et ce sans oublier les sectes), Eden Log parle explicitement de la vie après la mort, symbolisée par l'évolution de notre héros, à qui est (à priori) promis un paradis au bout de son long périple initiatique. Paradis qui ne sera bien évidemment pas celui qui lui aura été vendu. Exactement le message véhiculé par les sectes, et d'une façon identique par les religions, toutes origines confondues.
Mais ce voyage est aussi (avant tout) une initiation maçonnique. Le film regorge de symboles typiques de l'univers franc-maçon, le plus flagrant étant bien entendu l'architecte, passage obligatoire dans la compréhension de l'univers et de sa complexité. L'apprentissage par les symboles est aussi typique de l'organisation, tout comme l'opposition entre l'obscurité et l'illumination, etc...

Apparition mystèrieuse dans Eden Log, de Franck Viestel

Film lourd de sens, souvent cachés, mais toujours profonds, Eden Log ose aussi un visuel à contre courant. Minimalisme au possible, le film offre une palette de couleurs restreinte (le film est pratiquement monochrome), un nombre de personnages infime (en dehors de Clovis Cornillac, présent sur presque 100% des images, les vrais autres rôles du film se comptent sur les doigts d'une main), et un décor unique (les sous-sols d4enden Log, tourné avec beaucoup d'imagination dans une champignonnière en banlieue parisienne). La photographie de Thierry Pouget est pour beaucoup dans la cohérence visuelle du film, dont les mouvements de caméra à l'épaule à 180 degrés ont obligés à penser l'éclairage (ou son absence) avec un réalisme rare, ben souvent absent du cinéma de science-fiction, plutôt habitué à une photographie démonstrative ("regardez comme notre univers est beau" semblent dire la majorité des cinéastes de S-F).
Mais Eden Log a aussi fait des concessions, comme par exemple de tourner le film à la fois en français et en anglais, afin de satisfaire le public international. Le film s'est d'ailleurs très bien vendu à l'étranger, avec 18 pays l'ayant acheté, avec qui plus est un succès commercial notable (contrairement à la France qui a boudé ce film). Mais le tournage en deux langues distinctes n'a pas empêché de tourner le film dans des délais records (5 semaines de tournage pour seulement 10 mois de production). La raison principale étant bien entendu le budget, épais comme une feuille de cigarette, ne permettant pas de gaspiller le temps, et donc l'argent.

   
 


Conclusion

Eden Log, de Franck Viestel

Premier long de Franck Viestel, Eden Log est un film courageux, faisant fi des modes et des facilités du genre (univers ultra-colorés, démonstrativité des images, ...). Ce film est en quelque sorte l'antithèse du cinéma américain, trop démonstratif visuellement et pas assez thématiquement (the island pour n'en citer qu'un, pas forcément le pire d'ailleurs), où l'acteur n'est pas la star du film (je suis une légende en est le parfait exemple), et où les effets spéciaux sont le fond de commerce du film. Films qui d'ailleurs se consomment comme un paquet de pop-corn (et s'oublient de la même façon), là où Eden Log demande un effort. Effort pour rentrer dans l'univers, effort de réflexion, et finalement effort pour en sortir. Et ce malgré une fin légèrement ratée, sans doute par manque de moyens par rapport aux ambitions.
En tout cas, ce film prouve que les cinéastes de science-fiction français ont des choses à dire, comme l'avait déjà prouvé l'excellent Renaissance, de Christian Volckman. Quel dommage que le genre ait tant de difficultés en France. Messieurs les producteurs, n'ayez pas honte des films de science-fiction! Souvenez-vous: il fut un temps où le monde entier nous enviait Georges Méliès.

Eden Log de Franck Vestiel


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