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BAFTA |
catégorie |
Année | Nomination
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Meilleure photographie | 1983 | Jordan Cronenweth |
Meilleurs costumes | 1983 | Charles Knode et Michael Kaplan |
Meilleure direction artistique | 1983 | Lawrence G. Paull |
Academy of Science Fiction, Fantasy & Horror Films |
catégorie |
Année | Gagnant
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Meilleur réalisateur | 1983 | Ridley Scott |
Meilleur film de science-fiction | 1983 | |
Meilleurs effets visuels | 1983 | Douglas Trumbull et Richard Yuricich |
Meilleur acteur dans un second rôle | 1983 | Rutger Haueur |
BAFTA |
catégorie |
Année | Nomination
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Meilleur montage | 1983 | Terry Rawlings |
Meilleurs maquillages | 1983 | Marvin G. Westmore |
Meilleure musique | 1983 | Vangelis |
Meilleur son | 1983 | Peter Pennell, Bud Alper, Graham V. Hartstone, Gerry Humphreys |
Golden Globes |
catégorie |
Année | Nomination
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Meilleure musique | 1983 | Vangelis |
Oscars |
catégorie |
Année | Nomination
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Meilleurs décors | 1983 | Linda DeScenna |
Meilleurs effets visuels | 1983 | Douglas Trumbull, Richard Yuricich, David Dryer |
Ridley Scott (en tout cas à la fin des années70, début des années 80) n'est pas un réalisateur comme les autres. Issu de la publicité, il a toujours privilégié le visuel et son impact sur le spectateur dans son cinéma. Après le succès planétaire d'Alien, le huitième passager, le cinéaste se retrouve catalogué comme réalisateur de science-fiction. Ce qui, en soit, ne lui plait pas plus cela, ayant peur de se retrouver cantonné à un seul genre. Cela ne l'empêche pas, cependant, de se lancer dans un projet qui risque de s'avérer titanesque: l'adaptation du best seller du romancier Frank Herbert, Dune. Projet qui finalement se fera sans Ridley Scott (il sera mené à bien par David Lynch). L'homme est donc prêt à tourner un autre film de science-fiction, cette fois-ci tiré d'un des autres maîtres de la littérature de S-F, Philip K. Dick. L'œuvre dont doit être tirée un film est une longue nouvelle se nommant "les androïdes rêvent-ils de moutons électriques". L'histoire suit un chasseur de robots à forme humaine -les répliquants-, interdits sur Terre, cette dernière étant qui plus est gravement irradiée suite à la Troisième guerre mondiale (le roman a été écrit en pleine Guerre Froide). Résultat, la quasi totalité des animaux sont morts, et les gens se consolent avec des animaux robots (des répliquants animaux). Dans ce monde délabré, à la noirceur absolue, le chasseur de répliquant, Deckard, va se retrouver face à une crise de conscience (les répliquants sont-ils des êtres vivants, suis-je moi-même un répliquant?) et à un danger de mort (les répliquants de dernière génération sont non seulement plus intelligents mais aussi plus forts que les vieux modèles, voir peut-être même que l'homme). Le film mélangera donc science-fiction, enquête policière, réflexion sur l'existence (la vie, la mort,...), la philosophie, voir peut-être même jusqu'à un certain point le religion. Autant dire que Ridley Scott s'attaque à un chantier gigantesque. Surtout au vu du budget relativement restreint accordé au film (et ce malgré le succès de la guerre des étoiles, les producteurs ont encore peur de financer des films de S-F à gros budget)! Philip K. Dick a toujours été réticent aux adaptations tirées de son œuvre, l'auteur ayant toujours eu peur que ses écrits ne soient trahis lors du passage au média cinéma. Il faut dire que l'homme, dont la schizophrénie a toujours eu un impact fort sur les écrits, s'est créé un monde bien particulier, qu'il peut être difficile de rendre à l'écran. D'ailleurs, il est amusant (ou troublant) de noter que toutes les adaptations des écrits de K. Dick, que se soit par Ridley Scott (Blade Runner), Steven Spielberg (Minority Report) ou bien encore Paul Verhoeven (Total Recall), ont toujours mis l'accent sur l'aspect technologique de la S-F, tout au contraire de l'écrivain. Serait-ce pour masquer la difficulté à entrer dans un univers futuriste essentiellement cérébral? Peut-être. Mais pas seulement. Un exemple tout simple mais qui montre bien la difficulté d'adapter K. Dick aux contraintes du cinéma: comment vendre un film se nommant les androïdes rêvent-ils de moutons électriques? Titre à rallonge et plutôt rébarbatif, qui aurait plutôt comme conséquence de faire fuir les amateurs de S-F. Les scénaristes, producteurs et autres décisionnaires ont donc planchés pour trouver un titre à leur nouvel effort. Le film a ainsi failli s'appeler Android, Animal, Mechanismo, ou bien encore Dangerous Days, ce dernier ayant été considéré comme le plus probable. Le titre finalement choisi, Blade Runner, ne vient pas quand à lui de Philip K. Dick mais d'un autre auteur, William S. Burroughs. Il s'agit du titre d'une des nouvelles de l'auteur, dont les droits d'utilisations étaient disponibles. Maintenant que Ridley Scott est officiellement attaché au film (sans son nom le film ne se serait jamais fait), reste à caster les acteurs qui vont donner vie au monde de Philip K. Dick. Et là, une longue recherche va s'effectuer, en particulier pour trouver le Deckard idéal. Le chasseur de répliquants, détective paumé, loin du héros viril et bourlingueur que l'on peut attendre de ce genre de personnage, demande un acteur de qualité, charismatique et capable de rendre crédible ce héros en mal de vivre. Rapidement, le nom de Dustin Hoffman est retenu. Mais malheureusement, cela ne se fera pas. Il devient important de trouver un acteur capable de remplacer le génial acteur. Fort de ses succès dans La guerre des étoiles et les aventuriers de l'Arche Perdue, Harrison Ford s'impose rapidement comme le remplaçant idéal. Les fans de la franchise de George Lucas se font vite une joie de retrouver leur acteur dans un autre film de science fiction. Même si l'acteur semble motivé au début du projet, il déchantera rapidement, la méthode de travail de Ridley Scott ne convenant visiblement pas à Harrison Ford. Etrangement, l'humeur taciturne de l'acteur colle parfaitement à son personnage, et sera pour beaucoup dans la réussite du film. Si Ridley Scott avait voulu faire exprès, il n'aurait pas pu faire mieux. L'acteur principal est trouvé. Reste maintenant à trouver ceux sans qui le film n'aurait aucun sens: les répliquants. A tout seigneur tout honneur, le choix du chef des androïdes, Roy Batty, est essentiel. Le réalisateur britannique fait appel à un acteur alors inconnu, Rutger Hauer, dont le visage et le physique impressionnant, ainsi que le regard froid, sont idéaux pour le personnage. Le chef des androïdes est entouré de trois autres répliquants: un homme et deux femmes. Tous les trois doivent avoir l'air dangereux, et en plus de cela les deux femmes doivent dégager une sensualité féline. Pour le mâle, ce sera l'acteur Brion James et son physique impressionnant qui sera retenu. Il aura d'ailleurs l'honneur de démarrer le film, et ainsi de donner le ton! Pour le rôle de la danseuse au serpent, Zhora, se sera l'actrice Joanna Cassidy qui sera retenue. Le fait qu'elle est l'habitude des serpents (celui que l'on voit dans le film est le sien) n'y est sans doute pas pour rien. Enfin, Pris, la répliquante de plaisir (mais néanmoins mortelle) sera tenue par Daryl Hannah, alors totalement inconnue. Elle semble faite pour le rôle tant de par le physique (belle, grande, musclée, souple) que par le jeu (on a envie de la protéger, alors même que l'on sait qu'elle pourrait nous tuer pour un oui ou pour un non). Casting idéal pour une famille de freaks attachante. Une petite parenthèse s'impose. Au début de l'histoire, il est question de 6 répliquants ayant atterri sur terre. Un est mort avant le début de l'histoire. Les quatre que l'on suite pendant le reste de l'histoire sont Roy, Pris, Zhora et Léon. Mais où est donc passé le dernier répliquant. Toute une théorie (sur lequel nous reviendrons) nait alors, cherchant à trouver qui est le répliquant manquant, et pour une certains la réponse est claire: il ne peut s'agir que de Deckard! Malheureusement, cette théorie est totalement fausse, le dernier répliquant ayant tout simplement disparu suite à un problème purement financière, les scènes la mettant en scène (et oui, il s'agit d'une fille, se nommant Mary) n'ayant pu être tourné faute d'argent. Autant pour le mythe! Cela n'empêche pas l'histoire de faire intervenir un dernier répliquant, la encore joué par une fille. Cette dernière ignore son état, se croyant humaine. Le cinéaste voulait une jeune fille, belle et intelligente, mais surtout inconnue. Ce sera Sean Young qui obtiendra le rôle. Paradoxalement, les fans de S-F la verront la même année dans une autre grosse production de S-F, qui plus est qui devait être initialement tournée par Ridley Scott: le Dune de David Lynch. Le film, au fil des années, a créé un véritable mythe autours de lui. Ainsi que nombre de théories. La principale concernant bien évidemment Deckard. Et la question qui taraude les fans est la suivante: Est-il un répliquant qui s'ignore? Le nom même du personnage fait directement référence au philosophe français, Descartes, et semble être un indice indiquant une explication cachée. Les deux théories tiennent la route, avec des signes appuyant l'une ou l'autre des versions. Allant dans le sens d'un Deckard répliquant nous retrouvons une personne à priori bien placée pour le savoir: le réalisateur lui-même. Il a avoué lors d'une conférence de presse en 200l'avoir toujours envisagé ainsi. Pour étayer ses propos il faut se rappeler quelques scènes clés du film; tout d'abord, les rêves de licorne (licorne utilisée pour les préparations de son prochain film, Legend). Deckard rêve en effet de ces créatures mythologiques, et il apparaît que Gaff semble le savoir, ce qui impliquerait qu'il a eu accès à des données confidentielles de la Tyrell Corporation, société fabriquant les répliquants. Autre fait notable, son attachement à des vieilles photos, comportement typique des répliquants, cherchant à tout prix à se rattacher à un passé qu'ils n'ont jamais eu. Enfin, lors d'un cours moment (qui plus est coupé du montage original) on voir les yeux du blade runner briller comme seuls le font les yeux des répliquants. Ces quelques indices pourraient laisser à penser que la théorie est la bonne, mais les faits allant à l'encontre de cette vision sont pléthores. Pour commencer, on peur se rappeler que dans le roman de Philip K. Dick les répliquants cherchent à faire croire au héros qu'il est lui aussi un androïde, avant que ce dernier ne se rende compte que c'est faux. Bien sur, s'agissant du film, on pourrait penser que les scénaristes ont décidés d'aller dans ce sens. L'acteur principal, Harrison Ford, pense lui aussi que Deckard est bien ce qu'il pense être. Ajoutons à cela la longue expérience qu'il semble avoir au sein de la police (et pas seulement les souvenirs qu'il pourrait en avoir, ses collègues semblent eux aussi le connaître depuis longtemps), le chasseur étant pour ainsi dire à la retraite, qui est en contradiction complète avec les 4 ans de vie maximum accordés aux répliquants. De plus, les androïdes sont connus pour leur force et leur endurance exceptionnelle, ce qui est loin d'être le cas de Deckard. C'est d'autant plus fragrant dans le climax du film où Roy Batty s'enfonce un clou dans la main (ce qui le fait souffrir, convenons-en) mais arrive encore tout à fait à utiliser son membre abimé, tandis que Deckard a un mal fou à utiliser sa main aux doigts cassés. Son ressenti de la douleur est incomparable à celui des répliquants (les scènes pullulent dans le film pour le prouver). Enfin, et même s'il n'a jamais passé le fameux test permettant de détecter les répliquants, il vit au milieu des chasseurs d'androïdes, son identité aurait du mal à être passée inaperçue aux yeux des autres. Au final, c'est bien à chacun de se faire sa propre opinion sur le sujet. L'ambigüité sert même l'aura du film. Un autre fait qui a beaucoup joué pour l'aura du film: Ses nombreuses versions. En effet, Blade Runner compte pas moins de quatre versions différentes, chacune ayant ses fans et ses détracteurs. La première version est la version américaine du film telle qu'elle est initialement sortie sur les écrans en 1983. Cette version, qui n'a jamais été au goût de son réalisateur, est connue pour sa voix off d'Harrison Ford, et sa fin où l'on voit Deckard et Rachel partir loin de la ville. Cette fin, montée à partir de rush non utilisés du Shining de Stanley Kubrick, est le seul passage du film se déroulant hors de la ville, en journée, et ne présentant plus le côté sombre typique du reste du film. Une fin sous forme de happy-end que les fans ont appris à connaître mais qu'ils n'ont jamais aimé. La seconde version est la version dite européenne, telle qu'elle est sortie à l'époque sur les écrans en dehors du continent nord-américain. Montée sur le même principe que la version U.S. (voix off, fin annonçant des jours meilleurs), elle diffère cependant de la version américaine de part une censure moins marquée et des passages plus "gore". On est cependant loin d'un Braindead, le film restant tout public. La troisième version est la version dite director cut. Sortie en 1992, elle revient sur les points qui ont toujours déplus à Ridley Scott, telle que la voix off et la fin "happy end". Le film, déjà noir, sombre d'un seul coup dans un no futur déprimant, mais le film gagne en cohérence thématique (mais perd légèrement en clarté, à cause de la suppression de la voix off). Le mythe du Deckard répliquant vient essentiellement de cette version. La dernière version, qui date quand à elle de 2007, est connue sous le nom de Final Cut. Evolution de la director cut de 1992, elle règle essentiellement quelques petits problèmes de raccord (la doublure de Joanna Cassidy remplacée numériquement par l'actrice), quelques effets spéciaux ayant mal vieillis (ou des câbles apparents), ainsi qu'un nouvel étalonnage de l'image. Les effets gore de la version européenne sont aussi réintégrés. Le film, qui pourtant n'avait pratiquement pas vieilli, se métamorphose visuellement pour le plus grand plaisir des yeux. Au niveau de l'histoire, cependant, rien de nouveau. Tout comme l'avaient fait avant lui George Lucas pour sa trilogie Star Wars et Steven Spielberg pour E.T., Ridley Scott a redonné un coup de neuf à son film. A noter que dans tous les cas, un des points dont tout le monde de souvient concerne l'omniprésence de la publicité dans le film. Bien entendu, le placement de marques est évident. Cependant, cela est si bien intégré dans le film que l'agression publicitaire est absente (alors que paradoxalement dans le film les personnages sont eux agressés par la publicité, comme d'ailleurs dans les romans de Philip K. Dick). Le passé de publiciste du cinéaste est sans doute pour beaucoup dans l'intégration parfaite des marques dans le film. Pour une fois, d'ailleurs, la publicité apporte même un plus non négligeable à l'ambiance du film. Jamais film n'aura aussi bien réussi à satisfaire besoin financier et réussite artistique. Si vous avez aimé Blade Runner, vous aimerez aussi:
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Ridley Scott a toujours apporté beaucoup de soins au visuel de ses films, parfois peut-être au détriment du reste. Blade Runner est une réussite totale du point de vue esthétique, mélangeant parfaitement prises de vue live, mate painting, éclairages orignaux et ambiance film noir. D'ailleurs, mélanger science-fiction et film noir est une idée fabuleuse qui sied à merveille au film. Avec ce film, Ridley Scott signe à la fois la meilleure adaptation d'un récit de Philip K. Dick, et l'un des tous meilleurs films d'anticipation jamais tournés. Rares sont les films à ne pas subir l'outrage du temps, Blade Runner en fait partie, et s'en sort même haut la main. 25 ans après sa sortie, le film n'a toujours pas pris une ride, en particulier thématiquement. Si un film de la carrière du cinéaste mérite d'être considéré comme un chef d'œuvre, c'est bien celui-là! |