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Le Syndrome [E]


 


 
Le Syndrome [E], chez Pocket

Auteur

Franck Tilliez

 

Genre

Policier
 

Année de sortie

2010
 

Résumé

Une affaire étrange bouleverse l'été du lieutenant de police Lucie Hennebelle : un de ses ex-petits amis a perdu la vue en visionnant un court métrage, acheté au fils d'un collectionneur décédé. Un film muet, anonyme, à la mise en scène malsaine et au scenario énigmatique.
Au même moment, le commissaire Franck Sharko, ancien de la Criminelle, accepte de reprendre du service sous la pression de sa hiérarchie. Cinq cadavres sont alors retrouvés deux mètres sous terre. Cinq corps d'hommes impossibles à identifier, mains coupées, dents et yeux arrachés, boîte crânienne tranchée, cerveau disparu. Alors que Lucie découvre les horreurs que cache le film, un mystérieux coup de fil l'informe du lien ténu qui existe entre cette bobine et l'histoire des cinq corps. Une seule et même affaire grâce à laquelle Lucie et Sharko, si différents et pourtant si proches dans leur conception du métier, vont pouvoir se rencontrer...
Des bidonvilles du Caire aux orphelinats du Canada des années 1950, les deux équipiers vont mettre le doigt sur un mal inconnu baptisé le syndrome E. Un mal d'une réalité effrayante, qui révèle les atrocités dont nous serions tous capables...


 

 


 

Avis

Note :
 
Le Syndrome [E] Franck Thilliez persiste et signe avec son nouveau roman dans le genre qui la caractérise, à savoir le polar ultra sombre aux références cinéphiliques constantes. Il était donc logique qu'un jour, l'auteur de la chambre des morts se retrouve confronté à La Conspiration des ténèbres de Theodore Roszak, sans doute le thriller le plus connu (et sans doute le plus réussi) sur base de film maudit. Et le syndrome [E] de piocher allégrement dans le roman de Theodore Roszak, y récupérant à la fois le concept des images subliminales doublement cachées dans un film perdu, l'époque où le dit film a été tourné (l'âge d'or du cinéma Hollywoodien), la disparition mystérieuse de son auteur. Même le message caché dans le film s'avère très proche de celui de La Conspiration des ténèbres. L'hommage est trop forcé pour ne pas au mieux faire grincer des dents, au pire accuser Franck Thilliez de plagiat.
Du côté du cinéma et de la télévision, Le Syndrome [E] s'inspire, comme pratiquement tous les romans de l'auteur, des séries policières type les Experts, mais aussi de la fin absolue du monde, l'épisode de la série des Masters of Horror réalisée par John Carpenter où la vision d'un film maudit pousse les gens au suicide (épisode lui-même proche d'un autre film du même Carpenter, l'Antre de la folie, où c'est cette fois-ci la lecture d'un livre qui rend fou). Enfin, le syndrome [E] a un côté la nuit des fous vivants (ou son remake The Crazies) assez notable. Sans parler de l'anecdote concernant les yeux de la forêt, un des films mystérieux du roman, qui est une transposition fictionnelle du vrai film Cannibal Holocaust de Ruggero Deodato, scène du pal comprise, ainsi bien sur que l'obligation par la justice pour le cinéaste de prouver que les acteurs de son films étaient encore en vie!! Une anecdote hallucinante qui montre à la fois le talent de mise en scène de l'homme et la crédulité des instances officielles.
Si reconnaître les influences cinématographiques de l'auteur est comme un jeu avec le lecteur, il est à double tranchant, car il montre les limites du romancier (inspiration plus qu'influence, voir plagiat, avec tout ce que cela implique de déjà-vu et de perte de suspense), et surtout permet bien souvent au lecteur de prendre de l'avance sur l'intrigue, ce qui est toujours dommageable dans un thriller. Franck Thilliez s'en sort toutefois honorablement, en partie grâce à une gestion judicieuse du rythme, et aussi de par son sujet même, toujours efficace (en gros, les expériences menés par les gouvernements à l'insu des populations qu'ils sont censés protéger). Le Syndrome [E] est aussi, après les semi-échecs que furent Fractures et L'Anneau de Moebius un moyen de revenir dans la course, en créant un cross-over entre ses deux héros fétiches, Franck Sharko (Train d'enfer pour Ange Rouge et Deuil de miel) et Lucie Henebelle (La Chambre des morts et La Mémoire fantôme). Par contre, il est dommage que leur histoire soit aussi transparente et prévisible, fin en forme de cliffhanger compris (une fin qui ouvre d'ailleurs sur la suite, Gataca).
 
Si le syndrome [E] se lit avec plaisir (on peut même dire qu'il se dévore), il montre toutefois les limites de son auteur, Franck Thilliez, qui montre, au bout de presque dix romans, qu'il a bien du mal à évoluer (ses précédentes tentatives pour sortir de son genre ne sont pas de franches réussites). Cependant, bien que moins connu qu'un Maxime Chattam (qui lui aussi place l'une de ses intrigues au Caire, dans le sang du temps), Franck Thilliez arrive à proposer des intrigues plus intéressantes, et des personnages plus fouillés, bref, à se hisser dans le haut du panier des auteurs de polars non seulement français mais mondiaux.