Deuxième tome des aventures de Joshua Brolin, après
l'âme du mal, du
romancier français
Maxime Chattam,
In Tenebris nous plonge une nouvelle fois
dans les méandres de la folie des tueurs en série. Même s'ils sont américains (malheureusement U.S.A. et serials killers ont
toujours fait bon ménage), la folie, elle, est universelle.
Devenu détective privé suite à ses précédentes aventures, Brolin enquête sur la disparition d'une jeune fille,
tandis que l'inspectrice Annabel O'Donnel, elle, s'intéresse à une jeune femme, retrouvée nue et scalpée à
New-York. Les destins des deux protagonistes, ainsi que leurs enquêtes, vont se retrouvées étroitement liées. Une nouvelle
fois, Brolin va se retrouver face à une association de criminels psychopathes (comme si un tueur en série ne suffisait pas!). Les clubs de
tueurs en série semblent intéresser les auteurs français, puisque son homologue ch'timi
Franck Thilliez aborde lui aussi le sujet à très peu d'années
d'intervalle (l'excellent
la mémoire fantôme, suite de
la chambre des morts récemment porté au grand écran).
Maxime Chattam, quand à lui, avait déjà traité le sujet dans
l'âme du mal. Il faut cependant reconnaître que l'histoire fonctionne mieux
dans
In Tenebris que dans le premier tome.
Les points communs avec
Franck Thilliez ne s'arrêtent pas là. En dehors de leur
nationalité, des sujets abordés (les serials killers), de leur style à l'efficacité redoutable, les deux auteurs citent
volontairement leurs influences majeures, et celles-ci sont en grande partie identiques. En effet, en lisant les deux auteurs, on ne peut pas ne pas penser
à la référence absolue dans le genre,
Thomas Harris, et bien évidemment à son personnage le plus connu, Hannibal Lecter.
Le cinéma, en particulier américain, joue aussi un rôle prépondérant dans l'oeuvre des deux auteurs. Mais les deux
auteurs citent aussi, l'un de
In Tenebris, l'autre dans
Deuil de miel, l'un
des auteurs majeurs de la littérature français,
Victor Hugo, tous les deux au travers de la même imagerie: la cour des miracles.
L'usage qu'ils en font est là aussi pratiquement identique. Etrange, non?
Par contre
Maxime Chattam s'éloigne de son homologue
Franck Thilliez en citant
Shakespeare, au travers du personnage de Caliban (d'ailleurs
les héros du roman ont beaucoup de mal à faire le rapprochement, ce qui pour des anglo-saxons est un petit peu étonnant, surtout que
l'un est censé être un fan de théâtre). Cette référence le fait plus se rapprocher de l'auteur américain
Dan Simmons, qui s'est lui aussi lancé dans le policier récemment, et qui cite
à travers son oeuvre bien souvent le dramaturge anglais. Le personnage de Caliban, central dans
In Tenebris, l'est aussi chez
Dan Simmons dans sa saga de science-fiction
Ilium.
Maxime Chattam est en tout cas toujours aussi précis et documenté sur les
techniques d'investigation de la police scientifique, ainsi que sur la psychologie des tueurs en série, ce qui donne à ses romans un
réalisme qui est loin d'être déplaisant.
Le défaut majeur de l'auteur est d'avoir du mal à éviter la redite. Tout d'abord le style, et plus particulièrement le
déroulement du récit, strictement similaire à
l'âme du mal
(plus précisément dans la façon de passer d'un chapitre sur Brolin, puis un chapitre sur la fille l'accompagnant). Ensuite les
événements de l'histoire (Brolin qui se retrouve à devoir sauver la fille au dernier moment, celle-ci étant bien entendu aux prises
avec le tueur en série).
L'auteur a, comme de très nombreux auteurs de polars (la grande majorité même), la fâcheuse tendance à sombrer dans le
syndrome du whodunit, la faute à la reine du genre,
Agatha Christie, que tout auteur de policier vénère forcément.
L'avantage de ce genre de récit, c'est de créer un suspens, lié à un retournement de situation de dernière minute,
relançant ainsi toute la dramaturgie de l'histoire. Le défaut, majeur, c'est de très souvent sombrer dans l'irréalisme total.
En effet, dans la majorité des cas, le tueur est un proche du personnage principal. Les chances que cela se produisent réellement sont
tellement faibles, surtout que le tueur aide souvent le héros, que le lecteur n'y croit pas. Dans
In Tenebris, nous sommes à la limite
du réalisme. Cela aurait pu passer si la découverte de l'identité de l'assassin ne se produisait pas au moment juste où ce
dernier décide de passer à l'acte. Découverte effectuée par les deux héros, au même moment, à deux endroits
différents. Ajoutons à cela la longue explication du tueur sur ses raisons d'agir, ridicule au possible (on se croirait dans un James Bond),
et on comprendra pourquoi la fin du roman peut paraître bâclée au lecteur habitué au genre.
Heureusement que l'auteur est habile dans sa narration, et
In Tenebris s'en sort finalement plutôt bien.
Ceux qui ont aimé le roman de
Maxime Chattam pourront sans risque se plonger dans les
romans de
Franck Thilliez, ou bien encore dans des films comme
Vorace.
Joshua Brolin sera de retour dans le dernier volume de la trilogie,
Maléfices.