Les Courants de l'espace, écrit en 1952 fait partie des premiers romans publiés d'
Isaac Asimov. Il est classé
dans le
Cycle de l'Empire, aux côtés des romans
Cailloux dans le ciel et
Tyrann, auquel vient s'ajouter la nouvelle de jeunesse
Cul-de-sac, c'est
à dire des récits se déroulant dans l'univers du
Cycle de Fondation, mais sans faire directement partie de
l'histoire d'Harry Seldon et des ses psychohistoriens.
Isaac Asimov, en pur produit de son temps (en leader de file devrait-on dire), aime à mêler science-fiction et aventure
trépidantes, comme par exemple dans son cycle de
David Starr.
Les courants de l'espace, sans pour autant n'être qu'une simple aventure spatiale dépaysante, joue bien
entendu sur ce créneau, fort demandé par les amateurs de science-fiction de l'Après-guerre. Mais, le bon docteur de ne pas se cantonner à ce genre qui avait fait la gloire
d'un auteur comme
Edgar Rice Burroughs, et de mettre dans son roman nombre de petits plus qui feront la différence face aux concurrents. Tout d'abord, en faisant de son histoire un
récit policier, avec plusieurs mystères à la clé (qui est responsable de l'état du héros, quel est le danger qui pèse sur la planète?). Ensuite,
en y ajoutant un sous-texte politique.
Sur ce dernier point, rien de surprenant en soi, la science-fiction ayant de tout temps joué la carte de la satire sociale, ou tout du moins servi de focus sur les torts et défauts de
notre société. Dans
Les Courants de l'espace il est essentiellement question d'injustice sociale, de colonisation, voir de ségrégation raciale. Impossible de ne pas
penser à la période esclavagiste de l'histoire des Etats-Unis, surtout lorsque l'on pense que les habitants de Florina produisent ni plus ni moins qu'une sorte de coton. Un seul
personnage dans le roman pointe du doigt le côté ouvertement raciste et ségrégationniste des Sarkites. Le fait que ce personnage, le docteur Junz, soit noir, n'est
évidement pas un hasard. Ici, se sont des roux qui sont sujets à un esclavage de fait (comme d'ailleurs des années plus tard chez
G.J. Arnaud, dans sa saga de
La compagnie des glaces). Et l'auteur de trouver une solution pacifique, certes aidé par dame nature, pour remédier à ce problème d'injustice sociale.
Loin de n'être qu'un brûlot politique,
Les Courants de l'espace se veut avant tout divertissant. L'aventure est donc au rendez-vous, avec une pointe de romantisme (même si,
fait rare, la belle et jeune princesse ne tombera pas amoureuse du héros, il faudra chercher l'amour du côté de la rustre et presque disgracieuse paysanne), et surtout une
enquête policière à deux niveaux (comme vu plus tôt, tournant autours de l'identité du responsable et du danger menaçant Florina). La partie tournant autour de
l'identité du coupable se résoudra, comme dans tout bon roman policier qui se respecte, dans un bureau, où tous les protagonistes discuteront et détermineront
l'identité du coupable par la logique et la déduction. Tandis que le mystère tournant autour du danger s'avérera n'être qu'un
McGuffin, à savoir une excuse scénaristique servant à raconter une histoire (et qui pourrait donc être remplacé par
n'importe quel autre danger). Rendu célèbre par
Alfred Hitchcock le
McGuffin est un artifice idéal pour qui veut concentrer son histoire sur le cheminement permettant d'arriver à la conclusion et non sur
la conclusion en elle-même.
Néanmoins, comme toujours chez
Isaac Asimov ce fameux danger planant sur Florina, à savoir le risque imminent de voir le soleil
se transformant en nova, est basé sur un fait scientifique sérieux, en tout cas à l'époque où fut écrit l'histoire. En effet, si en ce milieu des
années 50 les scientifique pensaient que n'importe quelle planète pouvait potentiellement se transformer en nova, de études plus récentes ont démontrées qu'il
n'en était rien, et qu'en particulier les planètes de type M (c'est à dire celles permettant la vie humaine, comme notre soleil) n'avaient aucune chance de finit en nova, puisque
finissant leur vie au contraire à l'état de naine rouge (ce qui serait toutefois aussi mortel pour une planète qu'une transformation en nova). Malgré cette erreur aujourd'hui reconnue, l'histoire n'en reste pas moins passionnante.
Si
Les Courants de l'espace n'est ni le plus connu ni le meilleur des romans d'
Isaac Asimov, il n'en reste pas moins, comme
pratiquement tous les écrits du bon docteur, extrêmement divertissant, bien au dessus de la majorité de ses "concurrents".
Si un néophyte devrait plutôt commencer par les classique,
Fondation en tête, un fan de science-fiction old-school (et
ils sont légion) trouvera un véritable intérêt dans ce roman, tout comme il pourrait en trouver dans les œuvres les moins connues de
Philip K. Dick