retour à la page d'accueil

Retour Retour à la section dédiée au cinéma.

The Host

Affiche du film


Titre original

Gwoemul

Synopsis

A Séoul, Park Hee-bong tient un petit snack au bord de la rivière Han où il vit avec les siens. Il y a son fils aîné, l'immature Gang-du, sa fille Nam-joo, une championne malchanceuse de tir à l'arc, et Nam-il, son fils cadet éternellement au chômage. Tous idolâtrent la petite Hyun-seo, la fille unique de Gang-du. Un jour, un monstre géant et inconnu jusqu'à présent, surgit des profondeurs de la rivière. Quand la créature atteint les berges, elle se met à piétiner et attaquer la foule sauvagement, détruisant tout sur son passage. Le snack démoli, Gang-du tente de s'enfuir avec sa fille, mais il la perd dans la foule paniquée. Quand il l'aperçoit enfin, Hyun-seo est en train de se faire enlever par le monstre qui disparaît, en emportant la fillette au fond de la rivière. La famille Park décide alors de partir en croisade contre le monstre, pour retrouver Hyun-seo...

Genre

Fantastique

Année de production

2006

Corée du Sud

Date de sortie en France

21 mai 2006

Réalisateur

Bong Joon-ho

Musique

Lee Byung-woo

Casting

Acteur
Photo
Rôle
Song Kang-ho
Song Kang-ho Park Gang-Du
Byeon Hie-bong
Byeon Hie-bong Park Hie-bong
Park Hae-il
Park Hae-il Park Nam-il
Bae Du-na
Bae Du-na Park Nam-joo
Ko Ah-sung
Ko Ah-sung Park Hyun-seo
Paul Lazar
Paul Lazar Le docteur américain
Scott Wilson Le docteur américain à la morgue

 


Nominations

Saturn Award Academy of Science Fiction, Fantasy & Horror Films
catégorie
Année
Gagnant
Meilleur film internationnal2007 
Meilleur jeune actrice2007Ko Ah-sung

 

 

Critique du Film

Note :

Affiche internationnal de The Host

Et au milieu coule une rivière

Bong Joon-ho, comme de nombreux artistes de sa génération (l'homme est né à la fin des années 60), a été très influencé par les grands noms du cinéma populaire made in Hollywood, Ridley Scott en tête. Lorsque le jeune homme découvre Alien, cela le marque profondément. Des années plus tard, devenu réalisateur, Bong Joon-ho saura en tirer des leçons de mise en scène.
Bien sur, de part sa nationalité coréenne, le cinéaste a aussi profondément été marqué par le cinéma nippon (et ce même si les coréens n'aiment pas se l'avouer), et en particulier par les films de monstres géants de la Toho Company, dont le chef de file est bien entendu Godzilla.
Mais le film puise aussi son inspiration dans une triste histoire véridique. En 2000, un scandale éclate au pays du Matin Calme: une somme considérable de formaldéhyde (un produit hautement toxique) a été déversée dans le fleuve Han (qui traverse la capitale de la Corée du sud). Il s'avère que cette pollution a pour origine l'armée américaine. Ce scandale sera connu sous le nom d'affaire McFarland, du nom du scientifique tenu pour responsable de cette histoire. Il s'agira de l'inspiration principale pour le film de monstre de Bong Joon-ho

Song Kang-ho cherche à sauver sa fille Ko Ah-sung dans The Host, de Bong Joon-ho

Conscient du nombre considérable de films de monstres existant, aussi bien en Asie qu'en Amérique, le cinéaste sait qu'il devra se démarquer de ses "concurrents" s'il veut réussir son pari. Le film de monstre géant est avant tout une histoire japonaise, puisque le plus connu de tous est bien entendu Godzilla, qui, depuis 1954, détruit Tokyo et ses environs. Il a sévit dans une trentaine de films (le dernier datant de 2004), et est resté très populaire dans l'esprit des japonais et d'une grande partie des asiatiques en général. Le personnage, symbole du traumatisme post-Hiroshima des japonais, est devenu le porte-parole en quelque sorte d'un Japon tout d'abord en colère contre cet acte que l'on ne peut traiter que de monstrueux (pour rappel, on estime à environ 200 000 le nombre de morts -uniquement des civils- du directement au largage des deux bombes 1 sur les villes d'Hiroshima et Nagasaki), puis d'acceptation, avant de devenir une partie intégrante de leur culture, voir une force (dans la franchise, cela se transpose par le passage de Godzilla d'attaquant à défenseur du Japon).
De l'autre côté du Pacifique, on retrouve les autres grands faiseurs de monstres géants: les américains. Leur façon d'envisager les monstres est pourrait-on dire radicalement opposée à celle des japonais. En effet, pour Hollywood, un monstre, surtout s'il est géant, se doit de promulguer la grandeur du pays de l'Oncle Sam, non seulement au travers de ses personnages, tous plus héroïques les uns que les autres, mais aussi au travers de leur supériorité en tant que faiseurs de films. Les deux exemples les plus emblématiques du genre sont le Godzilla de Roland Emmerich, et le Cloverfield de Matt Reeves (que les deux se déroulent à New-York et que l'un soit justement un remake montre en soit la limite du cinéma américain sur le genre).
Dans le cas des japonais, les effets spéciaux peuvent être considérés comme naïfs (pour ne pas dire mauvais), tandis que dans le cas d'Hollywood, la surenchère d'effets spéciaux, de préférence numérique, prône.
Bong Joon-ho doit donc venir faire sa place entre les deux gros rouleaux compresseurs du genre.

la famille Park au complet dans The Host, de Bong Joon-ho

Le réalisateur fera alors un choix qui le verra se démarquer de la concurence: le réalisme. A l'instar d'un Steven Spielberg pour son remake de guerre des mondes, Bong Joon-ho veut que son film fasse crédible. Pour cela il décide que son monstre ne sera pas gigantesque, il sera juste gros. Pour cela, il garde en mémoire l'Alien du film de Ridley Scott qui doit son succès en partie à sa taille "humaine". Le cinéaste coréen site aussi comme source d'inspiration le Signes de M. Night Shyamalan, film qui lui aussi se base sur une forte dose de réalisme pour plus d'efficacité.
Ensuite, il fait le choix de prendre comme héros une famille modeste, banale, loin des last action heros dont le cinéma U.S. s'est fait une spécialité. Bong Joon-ho estime, à raison, qu'il est plus facile de s'identifier à des gens simples et modestes qu'à des supers vigilantes à la John McClane. De ce point de vue là, ses héros sont gratinés. Entre un chômeur (gros problème en Corée), un simplet (un tabou dans nombre de civilisations, pas seulement occidentale), et une petite dernière réservée (même le fait qu'elle soit médaillée olympique ne fait pas d'elle une héroïne, loin de là, le film faisant plutôt ressortir ses défauts que ses qualités), et enfin un père aux revenus modestes qui a se donne du mal pour que ses enfants ne soient pas malheureux, on voit que le réalisateur a tenu à nous présenter des gens vraiment normaux.

Bae Doona  dans The Host

Pour incarner cette petite famille, délaissée par un gouvernement coréen encore une fois dépassé par les événements (comme dans son premier long métrage, Memories of murder), Bong Joon-ho va faire appel à ce qu'il considère comme des valeurs sures. Song Kang-Ho et Park Hae-il, tout d'abord, qu'il avait déjà dirigé dans son memories of murder. Ensuite, Byeon Hee-bong et Bae Du-na, qui eux avaient participé à son second film, Barking dogs never bite. Bref, que des personnes avec qui il a déjà travaillé, en qui il a confiance, et dont il connait le talent. Seule nouvelle dans l'univers cinématographique de Bong Joon-ho, la jeune Ko Ah-seong (qui joue la jeune fille que désire sauver les Park). Elle sera d'ailleurs la révélation de ce film, son interprétation montrant déjà une maturité et un talent rare.
Une distribution de qualité devant la caméra, que le cinéaste associe à de talentueux faiseurs derrière la caméra. Kim Hyung-ku à la photographie (splendide, tout comme sur Memories of murder, Bong Joon-ho sachant tirer le meilleur parti de la pluie et de l'obscurité), fait là un travail exceptionnel. Il prouve (à qui en doute) que les coréens n'ont rien à envier en ce qui concerne le talent aux américains et autres gros producteurs de films mondiaux. Par contre, pour les SFX, les anglo-saxons s'avèrent toujours les meilleurs. Entre Weta Workshop (la trilogie du Seigneur des anneaux) et The Orphanage (Pirates des caraïbes 3: jusqu'au bout du monde), force est de constater que l'Asie (et en particulier la Corée) ne fait pas le poids sur ce genre de productions.

L'antre de la bête (The Host, de Bong Joon-ho)

Afin d'appuyer le côté réaliste de son film, Bong Joon-ho décide de tourner la maximum de scènes en décors naturels. Pour cela, il fait le tour de Séoul, et visite les lieux potentiels où pourraient se découler les différentes scènes du film. Les berges du fleuve Han, tout d'abord. Il s'agit de trouver un endroit où les gens se sentent en sécurité avant de le faire se transformer en enfer. L'emplacement idéal est vite trouvé, un lieu où les habitants de cette capitale de 10 millions d'habitants viennent se délasser le week-end. Ce sera aussi là où la famille Park tiendra sa petite boutique.
La créature se déplaçant aussi beaucoup autours des ponts (un endroit idéal pour elle pour, puisqu'en plus d'être le lieu où elle goutera pour la première fois de la chair humaine, cela lui permet de se mettre une fois de temps en temps au sec, ainsi que de passer d'une berge à l'autre rapidement, sans passer par le fleuve). Séoul en possède de nombreux, et les plus photogéniques sont choisis pour le film.
Enfin, et c'est sans doute les lieus les plus importants: les égouts. C'est en effet dans les gigantesques réseaux d'égouts de la ville où la créature vit. Et les égouts de la ville sont vite apparus au cinéaste comme parfaits pour le tournage (le résultat final le prouve d'ailleurs). Mais cela a posé quelques problèmes d'ordre technique. Tout d'abord, la maladie, les égouts étant pas définition une zone vectrice de maladies. Tous les techniciens et tous les acteurs devront subir une série de vaccinations afin de se garantir de tout incident. Le second problème est lié à l'humidité des lieus, difficilement compatible avec la mise en place de tout le matériel électrique nécessaire à un tournage. Là où un film américain aurait fait appel à une reconstitution en studios, les coréens ont pris des risques. Risques qui se sont avérés payants.

The Host, de Bong Joon-ho

Même lorsqu'il ne cherche pas à faire des films polémiques, Bong Joon-ho ne peut s'empêcher d'aborder la politique dans ses films. Dans Memories of murder le réalisateur abordait les années noires de la Corée, ainsi que l'incapacité de la police à protéger la population. Dans the Host, de nouveau, on retrouve un état incapable d'aider une famille dans le besoin. Le dédain avec lequel l'état traite les Park est un soufflet contre le gouvernement d'une nation qui cherche à redorer son blason au niveau international. Ajoutons à cela les sans abris, le chômage, des coréens prêts à vendre leurs amis pour de l'argent, les émeutes, et l'on se rend compte que le cinéaste voit son pays d'un drôle d'oeil.
Mais le cinéaste ne s'en prend pas qu'à son pays, puisque les Etats-Unis en prennent aussi pour leur grade. Entre le déversement de produits toxiques dans le fleuve, puis la vaporisation de l'agent jaune, presque aussi dangereux que le mal qu'il est censé soigné, on voit que Bong Joon-ho frappe fort. Et pourtant, ce n'était pas à l'origine volontaire de sa part, son désir premier étant de faire un film de monstre. Mais The Host est-il vraiment un film de monstre? Même Bong Joon-ho se pose la question. En effet, il dit qu'il suffit de remplacer la créature par un "simple" kidnappeur, et l'histoire de la famille Park en resterait pratiquement inchangée.

The Host, de Bong Joon-ho

Les coréens se sont rués sur The Host lors de sa sortie en salle. Résultat, The Host est à ce jour le plus gros succès en salle en Corée, avec 13 millions de spectateurs. Le monstre (traduction du titre coréen Goemul) que personne n'attendait a frappé, et très fort.
A l'international, le film a connu un certains succès, générant un revenu de 87 millions de $, pour un budget d'environ 11 millions de $.
Pas mal pour un petit film de monstre d'un petit pays cinématographiquement parlant. Après Old Boy, le Pays du Matin Calme prouve qu'il est capable de s'énerver.

   
 


Conclusion

Song Kang-ho dans The Host, de Bong Joon-ho

Mélange intelligent de film à gros spectacle et de dénonciation politique (coréenne et internationale), The Host est un film bien plus riche que la majorité des films à effets spéciaux que l'on a l'habitude de voir.
Le mélange horreur/ comédie (voir burlesque), cher au réalisateur Bong Joon-ho, peut par contre faire peur aux spectateurs occidentaux, qui risquent d'avoir du mal à comprendre que l'on peut avoir dans un même film hyper-réalisme (la première attaque de la bête) et comique (le représentant du gouvernement qui glisse).
En tout cas, Bong Joon-ho, prouve, après Memories of murder, qu'il est un cinéaste sur qui il faut compter, fer de lance de la nouvelle génération coréenne, prêt à attaquer les Etats-Unis sur ses plates-bandes, et capable de vaincre.

Affiche originale du film The Host, de Bong Joon-ho


retour à la page d'accueil