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![]() Bad Times est le premier film réalisé par David Ayer, scénariste de renom (Training day, mais aussi Fast & Furious et U-571). L'homme porte véritablement le film sur ses épaules, puisqu'en dehors de la réalisation, il occupe aussi les postes de scénariste et de producteur. Il faut dire que ce film est partiellement autobiographique, étant basé sur les années où l'homme a vécu à South Central, le quartier chaud de Los Angeles. Le script initial a été créé en 1996, et il aura fallu presque dix ans à David Ayer pour concrétiser son rêve: porter son cauchemar urbain à l'écran. Il faudra donc qu'il attende le succès de Training day, au sujet similaire, pour que les producteurs lui donnent le feu vert. Le fait de reprendre l'écriture au milieu des années 2000 a engendré une modification de taille: l'ajout de la guerre du golfe (rappelant ainsi le message du premier Rambo, dont on oublie trop facilement le véritable sujet de nos jours). Le traumatisme national que fut le 11 septembre a entraîné le pays de l'Oncle Sam dans une guerre qui dure depuis maintenant 4 ans (à l'époque de la sortie du film), et les soldats qui reviennent du Moyen-Orient son bien souvent traumatisés par ce qu'ils ont vécus là-bas. La guérison d'une nation passe-t-elle par le sacrifice d'une partie de ses enfants? Sans doute à en croire David Ayer. Surtout lorsque ces sacrifiés font partie des couches défavorisées de la société. Blanche, noire, ou latino, la couleur de la peau importe peu, seule compte la couleur du sang. ![]() ![]() Le film, qui débute par un cauchemar du personnage principal, incarné par Christian Bale (il est amusant de noter que Batman Begins, tourné la même année avec le même acteur principal commence lui aussi par une scène de cauchemar vécue par le héros), nous plonge directement dans la psyché d'un héros torturé par son passé, et dont les premières images ne laissent aucun doute sur l'avenir trouble du personnage. L'acteur est un habitué des rôles de psychotiques, puisque rien que l'année 2005 l'a vu dans la peau du super-héros le plus névrosé de l'histoire des comics, Batman (Batman Begins, de Christopher Nolan) et dans la peau (ou plutôt les os) de Trevor Reznik, l'insomniaque du machinist de Brad Anderson. Un malade de plus ou de moins, qu'est-ce pour un acteur de la trempe de Christian Bale? Surtout après avoir été Patrick Bateman dans American psycho, de Mary Harron? Un challenge, bien sur, l'acteur aimant se mettre en danger dans ses rôles et ses interprétations, prouvant à chaque fois l'étendue de son talent. Ce film n'échappe pas à la règle, Christian Bale étant comme toujours parfait, capable de passer par tous les stades du névrotique (stade amorphe, stade d'excitation extrême, stade de perte de contrôle,...) avec à chaque fois une crédibilité absolue. Et un charisme indéniable.... ![]() ![]() La force du scénario de David Ayer est d'avoir su rendre ses personnages crédibles, grâce à de nombreux détails les rendant attachants, humains, et tellement loin de la caricature habituelle des cités, que l'on a plus l'impression d'assister à un reportage qu'à un film. La façon dont est tournée le film, proche dans le grain du documentaire, rappelle d'ailleurs beaucoup les training day et autre Narc aux sujets similaires, tous deux sortis peu de temps auparavant. Que David Ayer soit impliqué dans deux de ces trois films n'a rien détonnant. Dans Bad Times le maître mot est fuite (enfin dans les faits c'est fuck, puisqu'il est prononcé environ 300 fois dans un film d'un petit peu moins de 2 heures...). Fuite de la réalité (les personnages incarnés par Christian Bale et Freddy Rodriguez au travers de leur manque de sérieux dans leur recherche de travail). Fuite vers l'étranger (la fiancée de Jim, incarnée par Tammy Trull, voulant à tout prix fuir le Mexique et la pauvreté pour une Amérique de rêve). Fuite des responsabilités (Jim, qui a un comportement pour le moins extrême à l'annonce de sa future paternité). Tout cela finit bien entendu dans la drogue (douce, peut-être, mais néanmoins dangereuse, surtout lorsque l'on se mêle -s'emmêle- au trafic), avec les conséquences désastreuses que naturellement cela ne peut qu'engendrer. La descente aux enfers est inéluctable, et rien ne peut venir sauver un héros, prix entre le chômage, la délinquance, le traumatisme de la guerre, et des amis guère en meilleur état. S'il y a bien un message que David Ayer arrive à faire passer, c'est bien la difficulté de s'en sortir lorsque l'on est dans un milieu défavorisé. Il y arrive d'ailleurs bien mieux que nombre de cinéastes contestataires et souvent communautaires (Spike Lee pour ne citer que lui), souvent plus proche de la caricature dans leur conflit des classes que David Ayer. ![]() Sachant qu'il peut être difficile pour le spectateur de bien comprendre tout ce qui passe par la tête de Jim, et surtout ce qui est bon pour lui ou pas, le réalisateur a fait de Toussant (Chaka Forman) la voix de la raison. Tout ce que dit son personnage (pourtant excentrique et à moitié camé) est soit une mise en garde, soit un recadrage de ce que devrait être la vie de Jim. Que ce dernier ne prenne pas en compte les conseils de son ami n'est en rien étonnant, mais il devra en payer les conséquences. Les deux moments clés marquants en sont bien sur son rapport avec fiancé (Tammy Trull) et le rapport drogue/guerre (le final du film). David Ayer en profite d'ailleurs discrètement pour glisser un message anti-drogue et anti-délinquance, le reste du film pouvant être pris comme une sorte d'apologie de ce mode de vie. Mais comme dans Requiem for a dream, plus le rêve est grand, plus la choc lors du retour à la réalité est dure. Si vous avez aimé Bad Times, vous aimerez aussi:
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![]() Difficile de rester indifférent devant un spectacle comme Bad Times, tant la réalité de la dureté de la vie dans les banlieues difficiles des Etats-Unis y est décrite de façon crédible. Pour son premier film derrière la caméra, David Ayer s'en sort plus qu'honorablement, malgré peut-être quelques défauts de redondance (les fameux fuck trop présents, même s'ils montrent bien l'enfermement langagier des communautés, ici le groupe d'amis Jim/Mike/Toussant). Christian Bale est encore une fois au top, non pas pour lui-même, mais bien au service du film, ce que de nombreuses têtes d'affiche ont tendance à oublier. Avec Training day, David Ayer a prouvé que non seulement il connaît bien le milieu des banlieues chaudes, mais qu'en plus, il sait comment les traiter au cinéma. ![]() ![]() |