Art et beauté dans l'esthétique médiévale n'est pas, comme certains autres essais d'
Umberto Eco, un ouvrage
aisément accessible. Même s'il a été édulcoré et simplifié par son auteur, il n'en reste pas moins ardu, car extrêmement pointu, qui plus est sur
un sujet peu connu et par définition difficile d'accès, en particulier au profane. En cela, cet essai est à mettre aux côtés des
Limites de l'interprétation ou de
Kant et l'ornithorynque du même auteur, plus que d'écrits
comme
Comment voyager avec un saumon?,
De la littérature, ou bien encore
Pastiches et postiches.
Umberto Eco, comme à son habitude, fait montre de son érudition, ainsi que de la maîtrise de son sujet (le Moyen Age est la
spécialité de l'homme). Il éclairera ainsi le néophyte sur un sujet méconnu, à propos duquel fourmillent les idées fausses. En effet, si le Moyen Age
a été décrit, en particulier durant le Renaissance, comme une période noire de l'Histoire, où l'inculture faisait face à l'obscurantisme,
Umberto Eco démontre ici non seulement qu'il n'en était rien, mais qu'en plus cette période histoire (qui a duré
huit siècles, soit plus longtemps que la distance qui nous sépare de la découverte des Amériques!) fut une période riche et complexe, surtout du point de vue
contemporain.
Le Moyen Age est une période extrêrement influencée (dirigée?) par la pensée religieuse, catholique tout particulièmement, avec tout ce que cela implique
d'immuabilité (ou en tout cas de fa&cccedil;ade), de tabous et de symbolisme. Mais aussi de contradictions, où le laid (au sens médiéval, s'entend) vient faire un contrepoint de poids
au beau (voir d'ailleurs à ce sujet le diptyque du même
Eco que forment les deux essais
Histoire de la beauté et
Histoire de la laideur).
Si
Art et beauté dans l'esthétique médiévale s'avère ardu à lire (pour le profane), il n'en reste pas moins un écrit essentiel sur la
pensée médiévale, une pensée complexe, riche, bien plus étendue et profonde qu'il est habituellement admis. Ce livre est en ce sens une façon de faire sortir le
Moyen Age de l'obscurantisme qui lui est faussement associé depuis bien trop longtemps maintenant.