Le fils rejeté est la suite du
cavalier rêveur, et correspond en anglais à la première des trois
parties du roman
Forest Mage en anglais, les deux autres étant
La Magie de la peur et
Le Choix du soldat. Si le
cavalier rêveur nous avait plongé dans l'enfer de la guerre bactériologique,
le fils rejeté nous
en narre les suites, presque aussi destructrices. D'un côté, on retrouve les survivants amoindris physiquement par la maladie (en particulier les deux amis de Jamère, Trist et Spic),
et de l'autre, Jamère, qui lui connait une transformation physique inverse, à savoir une prise de poids incontrôlable. Au point de vite devenir obèse. Ainsi,
Robin Hobb offre à ses lecteurs le premier héros de fantasy en surpoids, ce qui en soit mérite que l'on s'y
intéresse. Il faut cependant reconnaître que les événements de cette première partie manquent cruellement d'intérêt, et sont malheureusement hautement
prévisibles. Surtout que la psychologie des héros de
Robin Hobb (Fitz, Hiémain, et bien sur Jamère) est toujours
la même: un héros à la droiture exceptionnelle, qui ne rêve que de vivre une vie sans problème, et qui se retrouve confronté à des non-choix qui ne font
que détruire ses rêves, ses ambitions et sa vie. L'intérêt de ce
fils rejeté est donc ailleurs.
Tout d'abord, il est éclairant sur l'image de notre société sur le physique. D'autant plus que Jamère n'a pas toujours été gros (ce qui remet d'ailleurs en
lumière le personnage de Gord). Tout d'un coup, tous ou presque le rejettent et l'abandonnent, de sa sœur à sa fiancée en passant bien entendu par son père. D'autant
plus que Jamère n'a jamais eu un comportement aussi irréprochable que dans ce roman, gloutonnerie (incontrôlable car lié à la magie de la femme-arbre) mise à
part.
Ensuite, et c'est là le cœur du cycle de
Robin Hobb (mais de manière générale de tous les écrits de
l'auteure, cf.
le dieu dans l'ombre,
Alien Earth, et bien entendu ses
cycle de
l'assassin royal et des
aventuriers de la mer) met en avant le côté destructeur de l'homme sur la nature. Ici, l'obésité du héros est lié
à une malédiction ocelionne (c'est à dire les représentants de la Nature): la Nature démontre ici à l'homme que s'il vit en harmonie avec elle, il peut non
seulement vivre mais aussi prospérer, à un sacrifice prêt: l'abandon de son monde de vie actuel, par trop superficiel et destructeur. Le héros, repoussé par tous,
sera pourtant le seul à encaisser la nouvelle attaque de peste qui frappera les siens, prouvant l'efficacité (la nécessité?) de vivre suivant les lois de la nature, et ce
même si cela peut nous sembler (à l'instar du physique du héros) repoussant, voir régressif.
Ce message, les lecteurs de
Robin Hobb le connaissent par cœur, mais il est abordé dans ce cycle d'une façon quelque
peu nouvelle (mais rappelant tout de même quelque peu
le dieu dans l'ombre), donnant ainsi à ce
Forest Mage un
certain intérêt.
Le message de tous les écrits de
Robin Hobb, et en particulier de celui-ci, est le suivant: l'homme est-il capable de continuer son
expansion sans détruire la nature, ce qui aura comme conséquence un jour au mieux le déclin de l'humanité, au pire sa destruction?
Reste les deux gros défauts de ce cycle que sont un goût de déjà vu, et un récit toujours en retard sur le lecteur, qui par conséquence n'est jamais surpris
par sa lecture.