Le Saigneur des Ténèbres
Six longues années séparent ce Dracula, seigneur des ténèbres de son prédécesseur,
Le Cauchemar de Dracula (1959), du même Terence Fisher. Six longues années pendant lesquelles il a fallu réfléchir
à la façon de faire revenir le comte Dracula, à priori détruit à la fin du premier film.
Christopher Lee ayant fait une telle impression dans le film de 1959 qu'il
fallait absolument le faire revenir sous les traits du plus célèbre de tous les vampires du cinéma. L'acteur britannique,
attaché à la firme britannique Hammer n'avait cependant pas chaumé pendant toutes ses années, et avait incarné
de nombreux rôles pour la défunte société de production.
Vendant un nouveau face à face entre Christopher Lee et son ennemi de
toujours, Peter Cushing, les producteurs mentent effrontément. Puisque,
si le nom de Peter Cushing apparaît au casting, c'est
uniquement par l'usage de scènes tirées du Cauchemar de Dracula, l'action de déroulant 10 ans plus tard, et donc sans son
personnage de chasseur de vampire.
Ce film sera donc le deuxième Dracula de Christopher Lee, qui reprendra ce
rôle à maintes reprises tout au long de sa carrière, parfois sérieusement (les 6 films de la Hammer), parfois en dérision
(Dracula père et fils), parfois de façon historique (A la recherche de Dracula). Mais c'est bien évidemment dans les
films de la Hammer qu'il est le meilleur.
En effet, son incarnation du compte vampire est d'un hypnotisme absolu, l'acteur faisant oublier tous les autres acteurs ayant incarné Dracula
à chacune de ses apparitions, écrasant le reste du casting par son charisme gigantesque. C'est d'autant plus flagrant que l'acteur ne dit
pas un seul mot de tout le film (la rumeur prétend que Christopher Lee
trouvait les dialogues tellement affligeants qu'il a préféré se taire). Quand on pense que l'acteur est connu pour sa voix d'outre-tombe (cette même
voix lui a valu son rôle de Saruman dans Le Seigneur des anneaux: la communauté de l'anneau
de Peter Jackson). On pourrait croire pour un peu que Bram Stocker avait en
tête l'acteur lorsqu'il a écrit son roman, à la fin du XIXème siècle, tant
Christopher Lee correspond au personnage de Vlad Tepes, et ce même
physiquement.
Alors oui, comme la grande majorité des films de la Hammer les acteurs surjouent, se croyant sans doute au théâtre, ce qui peut
maintenant faire sourire, voir même prêter à rire. Il n'empêche que rares sont les films à réussir à placer
une telle ambiance noire, gothique, et parfois angoissante.
Bien sur, l'usage de la nuit américaine (cette méthode consistant à tourner de jour des scènes de nuit, et jouer ensuite sur
le contraste pour donner l'impression de la pleine nuit) est trop visible (en particulier dans certaines scènes où l'on peur voir des
ombres multiples, signe des spots et éclairages). Là encore le spectateur habitué aux standards actuels peut facilement sourire, mais
il faut impérativement replacer le film dans le contexte de l'époque. Les films de la Hammer étaient en leur temps LA
référence du genre. Des réalisateurs de tous horizons, de Mario Bava (le masque du démon), à
Francis Ford Coppola (son Dracula) ne peuvent cacher leurs influences.
De même que le décolleté de l'actrice Barbara Shelley, que l'on ne remarque plus maintenant, était à
l'époque d'un érotisme total, le lien entre le vampirisme et le sexe n'étant plus à prouver, et un film comme ce
Dracula, prince des Ténèbres le prouvant à chaque image mettant en scène le comte vampire. De Barbara Shelley,
lancinante et soumise à son maître, à Christopher Lee,
transpirant l'érotisme masculin chargé de testostérone, tout dans le comportement des vampires rapporte à la sexualité.
Si le mythe du vampire était aussi fort à cette époque, ce n'est pas pour rien, la libération sexuelle étant en cours.
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