
Attention, ce
traité d'athéologie n'est pas, contrairement à ce que peut laisser entendre son auteur,
Michel Onfray, une démonstration de la non-existence d'un dieu, quel qu'il soit, mais plutôt une analyse du danger
représenté par la religion, et en particulier la religion telle qu'elle est pratiquée par les trois grandes religions monothéistes de notre époque
(judaïsme, christianisme, et islam). Plutôt que de philosopher sur dieu,
Michel Onfray se lance dans l'archéologie
historique des religions, et démonte point par point leur fonctionnement. L'auteur, par trop ancré dans ses positions athées, manque bien souvent de vigilance dans ses attaques et
dénonciations, surtout que celles-ci manquent bien souvent de preuves (citations pratiquement inexistantes, approximations historiques, voir même utilisation de théorie aujourd'hui
très fortement remises en question - comme par exemple la thèse mythiste d'un Jésus non historique-). Chez
Michel Onfray la conclusion arrive bien trop souvent avant la démonstration (un comble pour un philosophe, qui plus est professeur
d'université). Bref, l'auteur est aveuglé par ses convictions non seulement athées mais aussi et surtout hédonistes.
Si ces deux positions n'ont en soi rien de répréhensibles (bien au contraire, surtout chez un philosophe),
Michel Onfray se
fait l'équivalent athée d'un leader religieux déclarant la guerre sainte à la religion de son voisin. Ce n'est pas ce que l'on demande d'un philosophe, encore moins d'un
athée.
Michel Onfray, et ce malgré des erreurs d'ailleurs souvent utilisées contre lui par ses détracteurs (cf.
L'anti-traité d'athéologie, le système Onfray mis à nu de
Matthieu Baumier), pointe du doigt les contradictions les plus flagrantes des trois religions
monothéistes (pour n'en cite qu'un:
"tu ne tueras point" ... sauf au nom de dieu) et démonte les mécanismes de déni ou de suppression pure et simple de ses
contradicteurs (l'exemple le plus connu de la chrétienté étant sans doute
Galilée). Ah, si seulement
Michel Onfray avait argumenté, citations à l'appui, au lieu d'encore et toujours attaquer! Résultat des courses:
les convaincus le restent (soit parce qu'ils sont d'accord avec
Onfray, soit parce qu'ils ne le sont pas et trouvent la démonstration
creuse), et seul l'auteur y trouve son compte (en particulier grâce à la polémique autour de son livre, qui attirera quelques 300 000 acheteurs). Mais bien sur, écrire un
essai sur non pas l'athéisme, encore une fois, mais la déconstruction des trois religions du Livre, aurait mérité bien plus que les 300 petites pages de son essai, et
surtout, bien plus de temps que l'auteur n'aura bien voulu y consacrer.
L'autre gros défaut de
Michel Onfray est son style, lourd et fastidieux, là ou par exemple un
Umberto Eco arrive à traiter de sujets aussi sensibles avec bien plus de légèreté, et surtout d'humilité,
une qualité dont fait défaut
Michel Onfray. Un style doublé d'un assommant didactisme directement tiré des
méthodes des prêcheurs religieux, ceux justement auquel il s'attaque.
S'il est difficile de nier l'intérêt de ce
traité d'athéisme, force est de constater qu'il n'est pas tout à fait au niveau des attentes liées à
un tel sujet. Il est pour cela conseiller de lire
Pour en finir avec Dieu de
Richard Dawkins (peut-être la référence du genre),
Dieu n'est pas grand : Comment la religion empoisonne tout de
Christopher Hitchens, ainsi bien entendu que les "classiques",
d'Holbach,
Kant,
Nietzsche, ou bien
encore
Freud (des auteurs bien souvent critiqués par
Michel Onfray).
Malgré tous ses défauts, on ressort de la lecture de ce
traité d'athéisme avec plein de questions, sans doute même plus qu'avant de le lire
(ce qui est plutôt d'ailleurs une bonne chose en soi, le but d'un livre étant avant tout de faire réfléchir). Pour cette raison, il est très fortement conseillé
de le lire, non pas comme une fin en soi, mais plutôt comme une aide à la recherche de la compréhension, par rapport à la foi, au pouvoir, et plus généralement
à notre monde.