Tous les lecteurs de
Terry Pratchett le savent depuis longtemps, les Annales du Disque-Monde nous décrit non pas un monde de fantasy
haut en couleurs mais bel et bien notre monde. Et c'est d'autant plus clair dans des romans comme
Les Zinzins d'Olive-Oued,
la Vérité,
Timbré,
Monnayé et bien entendu
Allez les mages. Après le cinéma, la presse, la monnaie, c'est maintenant au tour
du foot d'être expliqué par
Terry Pratchett. Et force est de constater que, comme d'habitude,
Terry Pratchett a tout compris. Non seulement au fonctionnement de l'être humain, mais aussi des liens culturels qui existent entre
le sport et le monde des paillettes, ici la Mode. D'ailleurs, l'une des grandes forces de ce roman (et pourtant, ce n'est pas ce qui manque), c'est bien d'avoir su effectuer un focus sur
l'évident parallèle entre le sport et la mode: même illusion des paillettes, même rêve pour les gosses (voir, et c'est bien plus ennuyeux, pour les grands), même
adulation aveugle des foules, même starification, avec ce que cela implique de mythes et de mensonges.
Comme dans une grande majorité de ses romans,
Terry Pratchett trouve son héros parmi le peuple. Ce qui est plutôt rare,
en particulier dans l'univers de la fantasy, car, même lorsque le héros est un fermier ou une servante, il y a fort à parier qu'il ou elle finira par se révéler être
un prince -une princesse- ou bien encore de façon plus générale un être exceptionnel amené par prédestination à avoir un destin hors norme. Après
les gardes du guet (
Au guet !), le plus mauvais magicien de tous les temps, Rincevent
(
La Huitième Couleur), un arnaqueur de bas étage, Moite von Lipwig
(
Timbré), et bien d'autres encore, l'auteur fait d'une simple cuisinière (de nuit) l'héroïne de son nouveau
récit. Et comme si cela ne suffisait pas, il y adjoint un fondeur de bougie (gobelin, donc d'une race inférieure qui plus est), un bon à rien (Trev), et une fille sans cervelle
(Juliette). Car le message de l'auteur a toujours été le même: dans la vraie vie, les Héros n'existent pas, il n'existe que des héros ordinaires. A chacun d'entre
nous de le devenir.
Une autre grande force de l'auteur est de savoir retourner à son grès l'image de ses personnages, qui, de personnage secondaires deviennent de premier plan (Mustrum Ridculle, devenu au
fil des récits l'un des personnages les plus importants de la saga), ou bien le contraire (le cas Rincevent est de ce point de vue là exemplaire, au risque de fâcher ses lecteurs,
toujours en attente de nouvelles aventures du malheureux "maje"). Ainsi, la Mort, personnage à priori horrible et terrifiant, est, depuis
Mortimer, devenu l'un des personnages favoris des fans, et fait quasi systématiquement un petit passage dans les histoires du
Disque-Monde, parfois en héros, parfois en guest star. L'autre exemple le plus frappant est le cas du Patricien Vétérini, vu au tout début de la saga comme un tyran odieux et
sanguinaire, pour par la suite devenir ce qui apparaît comme le seul personnage sensé de toute la saga.
On passe toujours un excellent moment à lire un récit du Disque-Monde, même au bout de 33 tomes, car l'auteur sait manier l'humour nonsensique (mais paradoxalement lourd de sens)
avec un talent unique, tout en offrant un second niveau de lecture où subtilité et compréhension de la nature humaine et du fonctionnement du monde viennent remettre en cause de
nombreuses idées reçues, et place son auteur parmi les grands penseurs de son temps, rien que cela.
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