Le scénariste et producteur
Luc Bossi mélange pour son premier roman ses deux passions littéraires:
Freud
et le thriller. L'idée de base est plutôt séduisante: mettre face à face un tueur en série pour le moins tordu et les deux plus grands psychanalystes de
l'Histoire, à savoir
Sigmund Freud et
Carl Jung. Tout cela sur fond d'une ville de New-York sortant de terre, avec comme point de mire les plus prestigieux buildings de
la ville. Si le roman se laisse très facilement lire, force est de constater les nombreuses faiblesses scénaristiques (un comble pour quelqu'un dont c'est justement le
métier!) mais surtout les incohérences, en particulier historique.
Admettons que les deux grands hommes se retrouvent face à une telle histoire policière (quoique, cela est tellement peu crédible... Typique en fait des ficelles
scénaristiques du Septième Art), mais quelle histoire peu vraisemblable! Tous les poncifs de la psychanalyse se retrouvent ici survolés, qui plus est concentrés dans
pratiquement un seul personnage (Grace Korda), et surtout élucidés en une ou deux séances maximum (de quoi mettre au chômage tous les psys de la terre!). Les
retournements de situations manquent cruellement de crédibilité, tout comme les motivations et les méthodes du tueur (la palme revenant au supplice de l'oiseau
empoisonné qui, même s'il existe véritablement -mais n'a été découvert qu'à la fin du XXème siècle- ne peut manquer de faire
sourire le lecteur).
Comme bien souvent dans les mauvais thrillers, l'auteur cherche à complexifier le modus operandi du tueur au maximum, afin de le rendre plus mystérieux et effrayant. Mais c'est
bien souvent tout le contraire qui se passe, le tueur perdant toute crédibilité psychologique (un comble dans un roman comme celui-ci).
Si l'ambiance est plutôt plaisante en soi, le manque de maturité d'écrivain (ainsi sans doute que son expérience dans le monde du cinéma et de la
télévision) de
Luc Bossi se fait par trop sentir, plombant un roman au sujet pourtant très attractif et original.
Il aurait sans doute fallu s'intéresser beaucoup plus aux vrais personnages historiques (et le roman en propose quelques uns) et beaucoup moins au tueur. Exactement le même
problème qu'a eu
Greg Keyes avec sa saga de
l'âge de la déraison, où l'auteur nous propose de suivre les aventures du jeune
Benjamin Franklin, qui ressemble à beaucoup de choses sauf au père de la Constitution Américaine.
Au final, un roman fait pour être lu à la plage, à un moment où l'on n'a pas envie de réfléchir (et où d'ailleurs il ne le faut pas), divertissant
mais sans doute trop "prétentieux" pour un auteur habitué à des productions cinéma et télévisuelle calibrés pour un public peu regardant sur
la qualité. N'importe quelle enquête d'Hercule Poirot est cent fois plus efficace que celle de ce
Manhattan Freud.