Nuits au fer rouge est le sixième volume de la série
Garret détective privé, une saga bien plus maline qu'il n'y paraît au premier coup d'œil. En effet,
l'auteur,
Glen Cook (
la compagnie noire), joue à la fois avec les codes
du polar hard boiled et de l'heroic-fantasy, deux genres à priori absolument incompatibles. Et le tout, histoire de pimenter le tout, en utilisant un langage typique des hommes de troupes et des
soldats (en quelque sorte la marque de fabrique de l'auteur). Et, grâce au talent de l'auteur, ce mélange improbable des genres prend, et même plutôt bien. La preuve? Au bout
du sixième épisode, le lecteur en redemande encore, se laissant encore et toujours prendre au jeu, quand bien même les ficelles sont toujours les mêmes (la belle jeune fille
en détresse, la sorcellerie qui dépasse, et de loin, le héros, les sbires des bas-fonds,...).
Glen Cook vient, dans ce nouvel opus, mêler une thématique rare (voir inexistante) dans le monde de l'heroic-fantasy, à
savoir celle du tueur en série. Mais bien sur, fantasy oblige, la sorcellerie n'est jamais loin, apportant une pierre intéressante à la mythologie du serial killer. Ici, il
s'agit clairement d'une version mythologique de Jack l'Eventreur,
Glen Cook n'ayant pas son pareil pour montrer l'âme humaine dans ce
qu'elle a de plus abjecte et répugnante. Les auteurs de polar "sérieux" devraient en prendre de la graine!
Finalement, cette saga s'avère un excellent choix pour tous les amateurs d'heroic-fantasy lassés par une production souvent interchangeable, cherchant par trop à copier les
classiques du genre (de
J.R.R. Tolkien à
R.E. Howard, en passant, malheureusement, par les franchises types donjons & dragons
ou Warhammer). D'ailleurs, la série
Garret détective privé n'est pas sans rappeler
les annales du Disque-Monde de
Terry Pratchett, en cela que les
deux auteurs détournent les codes de l'heroic-fantasy pour les emmener dans des directions nouvelles et hautement originales. De plus, les deux auteurs utilisent l'humour avec pertinence,
même si l'un (
Pratchett) se veut bien plus léger que l'autre (
Cook).
Glen Cook, avec sa saga
Garret détective privé, montre clairement son appartenance à la mouvance littéraire
anglo-saxonne, une littérature qui apporte autant d'importance (si ce n'est plus) à l'Entertainment grand public qu'à l'élitisme littéraire européen (ce qui
n'empêche par les américains d'avoir des auteurs de premier plan comme
Joyce ou
Hemingway).