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Nul n'est meilleur que Philip K. Dick dans le monde de la science-fiction pour décrire des mondes paranoïaques, où la réalité quotidienne de notre monde bascule petit à petit dans l'étrange. Le temps désarticulé est un exemple parfait de ce que l'auteur du maître du haut château sait faire dans le genre.
Le début du roman débute donc comme une histoire classique, et pourrait presque être du mainstream (Philip K. Dick s'essaiera d'ailleurs plus tard au mainstream, avec la transmigration de Timothy Archer, l'auteur ne faisant pour sa part que peu de distinction entre les courant principal et les littératures dites de genre), tant l'auteur prend son temps à installer son histoire. Il désire, bien plus que dans ses autres romans, nous ancrer dans la réalité quotidienne de son temps (le livre se déroule dans les années 50, donc au moment où a été écrit le roman), le but étant bien entendu de rendre encore plus étrange toutes les petites bizarreries qui vont apparaître à nos héros, et leur faire prendre conscience que le monde où ils vivent n'est sans doute pas la réalité.
Le rapport entre le héros, Ragle Gumm, et sa charmante (mais mariée) voisine Junie Black est assez atypique dans l'oeuvre de Philip K. Dick. Même si les maris -et femmes- volages ne sont pas rares chez l'écrivain (par exemple, dans Docteur Futur, le héros trompe allégrement sa femme sans que cela ne lui pose le moindre problème éthique), il est cependant relativement rare d'y voir un tabou brisé. Surtout concernant la sexualité, les romans dickiens étant souvent très fortement sexués (mais jamais ni vulgaires ni racoleurs). L'adultère (ici pourtant jamais consommé) sert bien évidemment à ancrer l'histoire dans le réel, pour mieux le faire exploser par la suite.
Toute la seconde moitié du roman, que l'on pourrait sous-titrer la révélation, est d'une efficacité totale, le roman sombrant tout un coup dans un univers de science-fiction pessimiste et dangereux comme Philip K. Dick en a l'habitude. Et l'auteur de s'autoriser un double twist (la révélation quand au mystère entourant l'univers où vit Ragle Gumm, puis le pourquoi de cet univers étrange). Et à chaque fois, le lecteur ne peut qu'applaudir le génie de cet auteur exceptionnel qu'est Philip K. Dick.
 
Big Brother n'est jamais loin chez Philip K. Dick, mais à chaque roman, l'auteur nous entraine vers de nouveaux horizons, tous plus noirs les uns que les autres.
L'avenir est sombre, et Philip K. Dick s'en fait l'annonciateur.
 
 
 
Le titre original du roman, Time out of join, est une citation d'Hamlet, de William Shakespeare. Qui a dit que les auteurs de science-fiction ne connaissaient pas leurs lettres classiques? Et ce n'est pas un Dan Simmons qui viendra prouver le contraire, temps ses écrits sont emprunts des classiques du Barde.
Si en plus d'être intéressants thématiquement, les auteurs de science-fiction montrent leur culture, où va le monde...