Après un premier tome (dans la version française, la version originale ne comprenant qu'un seul volume) pratiquement uniquement axé
sur les manigances politiques et diplomatiques des trois grandes nations du secteur (Manticore, Havre et l'Empire Andermien), cette seconde partie,
quoique continuant à compliquer encore un petit peu plus le jeu, amorce une nouvelle étape (ou plutôt un retour en arrière):
la guerre!
La situation est de plus en plus délicate pour Honor et les siens, et il est assez difficile d'imaginer comment elle va s'en sortir. Surtout
lorsque l'on sait que l'auteur,
David Weber, est un grand sadique, qui aime jouer avec les
nerfs de ses lecteurs, et qui adore par dessus tout tuer des personnages à priori intouchable. Surtout lorsqu'il a mis des centaines de pages
(et parfois plusieurs romans) à nous faire découvrir et apprécier. Cet épisode n'échappe pas à la règle.
Et la fin, tout comme dans le précédent roman de la saga,
les cendres de la victoire, la surprise finale est de taille, changeant
définitivement la donne de l'univers Harrington. Alors qu'il serait possible de se dire que l'auteur ne veut surtout pas toucher à ses
protagonistes, et en particulier les méchants de l'histoire (qui n'ont jamais été aussi difficile à discerner des bons que
dans ce roman), de peur de s'aliéner son lectorat (lectorat souvent friand de méchants qu'il prend plaisir à détester),
David Weber nous prouve qu'il n'en est rien et qu'il sait prendre des risques narratifs
lorsqu'il estime que cela en vaut la peine. Pour, au final, la plus grande satisfaction du lecteur.
Une des grandes forces de l'auteur, qu'il avait d'ailleurs déjà réussi à prouver lors des précédentes aventures
de son héroïne, est de savoir passionner son lectorat sans pour autant accumuler les scènes d'action, de bravoure, et les grandes
batailles spatiales (même s'il le fait comme peu d'autres). Arriver, pendant plus de 1000 pages, à créer une tension et un
intérêt permanant, en décrivant des réunions d'état-major et des tours de table politique démontre un réel talent de
conteur. Talent que l'auteur a indéniablement, prouvant d'ailleurs les progrès qu'il a fait depuis ses premiers romans, de
La voie des furies à sa première série,
les héritiers de l'Empire.
La grande qualité de cet épisode, par rapport aux précédents, est d'avoir su inverser la vapeur, et de faire des anciens
gentils les méchants, et vice-versa. Ainsi, la République Havrienne, depuis la destitution de l'Ancien Régime, se retrouve avec
à sa tête une présidente, Eloïse Pritchart, dont la droiture est une fait avéré, et dont le bras droit, l'amiral Theisman, est
du même acabit. Tandis qu'à Manticore, le premier ministre, Haute-Crête, ne pense qu'à une chose: s'assurer de ne pas perdre
sa position et son pouvoir. Très vite, il apparaît que les deux camps ont raisons, en tout cas de leur point de vue, de maintenir leurs
positions sur la paix (ou la guerre), et que le conflit redevient inévitable. Cette opposition à priori sans possible résolution
pacifique est tellement crédible que le roman se hisse à des niveaux rarement atteints dans le genre, rappelant fortement les meilleures
heures des grands romans d'aventure d'
Alexandre Dumas.
Même si, au bon d'une quinzaine de tomes, le lecteur peut commencer à se lasser (et ce même si la saga est d'un niveau constant,
toujours de très bonne qualité), l'auteur arrive à maintenir l'intérêt (et la cohésion de son univers) de bout en
bout. Ce qui rapproche
la saga Harrington d'une autre très grande saga de S-F,
le cycle de Fondation, du maître du genre,
Isaac Asimov. Rares sont ceux qui peuvent venir se frotter à de tels pointures.