Michel Robert continue sa saga de l'Ange du Chaos, Cellendhyll de Cortavar, et,
après
Hors-Destin, se lâche de plus en plus dans la caractérisation
maladive de ses fantasmes les plus typiquement masculins. L'histoire apparait de plus en comme un prétexte à la description de tous les
fantasmes de la tranche visée par ce genre de romans, à savoir les adolescents pré-pubères en quête de reconnaissance et
de sexe. Le héros, dans lequel le lecteur est sensé s'identifier, est donc beau, fort, intelligent, riche, puissant,... De plus, il est
aimé des femmes (elles sont toutes folles de lui, sans exception, enfin, mis à part les moches bien sur), et il est admiré par les
hommes. Dans sa partie (le meurtre et la violence) il est le meilleur. Bref, en un seul homme les trois quarts des adolescents retrouvent un exutoire
contre leur dure condition... Les adultes, eux, ne manqueront pas de noter le ridicule du personnage. Bonjour pour l'identification du lecteur.
Non content de livrer en pâture à ses lecteurs un tel personnage,
Michel Robert en
remet une couche avec Estrée, décrite comme une bombe sexuelle, usant de son charme pour tromper les hommes et les abuser, mais
éperdument amoureuse de l'homme de sa vie, le mystérieux Cellendhyll. Encore une fois, le personnage est tellement caricatural et
symptomatique de la représentation qu'un certain type d'homme se fait de la femme que cela en devient gênant, surtout lorsque cela est fait
au premier degré.
Tandis que les héros sont vus comme le summum de la cool-attitude, les méchants sont décrits comme dépravés et
sexuellement malsains. Chez
Michel Robert il faut traduire malsain par homosexuel!
Bonjour la mentalité. Pour preuve les descriptions censées être odieuses des rapports entre des êtres abjects s'adonnant
à des pratiques comme la fellation et la sodomie, tandis que le héros, parangon du bien pensant, s'adonne strictement aux mêmes
pratiques, mais qui, bizarrement, sont vues cette fois-ci comme fantasmatoires au possible. La lecture de ses mots a réellement quelque chose de
dérangeant, surtout vis à vis de la mentalité de l'auteur.
Viennent s'ajouter les agapes du héros, qui se vautre dans le luxe, mordant la vie à pleine bouche, tandis que les méchants, eux
aussi très riches, vivent soit dans la débauche de drogue, soit, pire encore, dans le dénuement le plus total.
L'histoire, quand à elle, manque de plus en plus cruellement d'idées, et ressemble de plus en plus à un ramassis d'idées piochées à
droite à gauche, au sein de la très nombreuse littérature d'Heroic Fantasy. On retrouve les mêmes influences que dans les
précédents romans du cycle de
L'Ange du chaos, à savoir le Jeu de Rôles,
Michael Moorcock,
R.E. Howard,
Pierre Grimbert (bien évidemment), ainsi que le maître à penser de tous
les auteurs du genre,
J.R.R. Tolkien.
L'histoire arrive enfin à son dénouement, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il était temps. En effet, plus le roman avance,
et plus le lecteur a envie d'en voir le bout, non pas temps que la conclusion de l'histoire l'intéresse (l'origine de la Dague Sombre, la
prophétie, la trahison d'Estrée,...), mais bien au contraire que le calvaire s'arrête. L'auteur accumule les combats, dont le suspens
est absent, puisque le héros semble totalement invulnérable, et les méchants sont de plus en plus risibles au fil des
événements. On en arrive même au summum lorsque le héros se voir proposer une place dans les forces de la Lumière, puis des
Ténèbres. Mais il préfère rester au Chaos, dont il est devenu le héros.
Heureusement que le roman se lit facilement, le style étant très fluide, sinon rien ne serait resté de ce cycle, dont il était
temps qu'il se termine. Cependant, il reste encore de nombreuses choses en suspens, et on sait déjà qu'il y aura une suite.
Un cycle à ne conseiller qu'aux fans de littérature de gare, ou ayant déjà lu tous les grands classiques du genre.
"Je suis l'Ombre,
Insaisissable et mortelle,
Mon corps est une lame;
Mon esprit est une arme.
Il n'y a qu'une voie,
S'adapter c'est vraincre,
Je suis l'Ombre,
Je danse et je tue."